21 septembre 2025

Le cadre légal de base
Lorsque vous êtes licencié, il est essentiel de comprendre qu’il existe un délai légal au-delà duquel vous ne pouvez plus contester cette décision. Ce délai est encadré par le Code du travail, et il s’applique de manière uniforme, quel que soit le motif du licenciement.
Délai général : 12 mois selon l'article L.1471‑1 du Code du travail
Depuis la réforme des ordonnances Macron en 2017, le délai de prescription pour contester un licenciement est fixé à 12 mois.
C’est l’article L.1471‑1 du Code du travail qui l’établit :
"Toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture."
Ce délai concerne aussi bien les licenciements pour motif personnel, motif économique, faute grave ou faute lourde.
⚠️ Passé ce délai, votre demande devant le Conseil de prud’hommes sera déclarée irrecevable, même si votre licenciement était injustifié.
Quelle est la date de départ ? Réception effective et conséquences
Le point de départ du délai n’est ni la date de l’entretien préalable, ni celle d’envoi de la lettre de licenciement.
C’est la date de réception de la lettre par le salarié qui déclenche le délai. Et le lendemain de cette date marque officiellement le premier jour du décompte.
Exemple : vous recevez votre lettre recommandée le 6 septembre. Le délai court du 7 septembre au 6 septembre de l’année suivante.
Clarification jurisprudentielle : arrêt du 21 mai 2025
Face aux confusions persistantes sur le point de départ du délai de prescription, la Cour de cassation est intervenue pour clarifier les choses. L’arrêt rendu le 21 mai 2025 a apporté une réponse nette : le calcul du délai ne commence pas à la date de l’envoi, mais bien à la date de réception de la lettre de licenciement, plus un jour.
La Cour de cassation tranche : point de départ = le lendemain de la réception
Voici ce qu’a décidé la chambre sociale :
"La prescription prévue à l’article L.1471-1 du Code du travail court à compter du lendemain de la réception de la lettre de licenciement notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception."
Cette précision vise à protéger les droits du salarié, en lui assurant un délai complet de 12 mois à partir du moment où il a connaissance effective de la rupture.
Conséquences pratiques pour le salarié
En pratique, cela signifie que :
Vous devez noter la date exacte de réception de la lettre (signature de l’AR ou date de retrait à La Poste).
Le compte à rebours démarre le lendemain.
Vous avez ensuite 365 jours pleins pour saisir le Conseil de prud’hommes.
Exemple concret : Lettre reçue le 15 octobre 2025 → le délai court du 16 octobre 2025 au 15 octobre 2026 inclus.
Conseil : prenez une photo de l’avis de réception et conservez précieusement l’enveloppe, elle fait foi.
Exceptions et cas particuliers à ne pas négliger
Si la règle du délai de 12 mois s’applique à la majorité des situations, certaines circonstances exceptionnelles peuvent allonger ou suspendre ce délai. En connaître les contours peut vous permettre de sauver un recours a priori perdu.
Suspension du délai : en cas de troubles graves
La prescription peut être suspendue dans certaines situations, notamment lorsque le salarié est dans l’incapacité d’agir en justice.
Exemples de motifs admis :
Hospitalisation prolongée ou altération de ses facultés mentales.
État de choc psychologique documenté par un certificat médical.
Accident ou événement empêchant toute démarche administrative.
Mais attention : il faut prouver l’empêchement avec des éléments concrets. Sans justificatif, la suspension ne sera pas admise par le juge.
Cas de harcèlement ou atteinte aux droits fondamentaux : prescription étendue à 5 ans
Lorsque le licenciement s’inscrit dans un contexte de discrimination, de harcèlement ou de violation de libertés fondamentales, le délai classique de 12 mois ne s’applique pas. Le salarié peut alors agir sur la base :
Du Code civil : délai de 5 ans pour les atteintes aux droits fondamentaux (article 2224).
Du Code du travail, notamment pour les litiges liés à l’égalité professionnelle (art L1132-1), à la liberté syndicale ou à la dénonciation de faits de harcèlement (art L1152-1 et L1153-1).
Exemple : une salariée licenciée après avoir dénoncé un harcèlement peut contester son licenciement même au-delà de l’année légale, si elle prouve que cette rupture est une mesure de représailles.
⚠️ Ces actions doivent toutefois s’appuyer sur des preuves solides. Le recours à un avocat est ici déterminant.
Erreurs fréquentes et confusions à éviter
Malgré les clarifications apportées par la loi et la jurisprudence, de nombreuses confusions subsistent concernant le délai de prescription pour contester un licenciement. Ces erreurs peuvent coûter cher jusqu’à vous faire perdre votre droit à agir. Voici les pièges les plus courants à éviter.
Sources juridiques obsolètes : attention aux anciens délais
Avant la réforme de 2017, certains types de licenciements pouvaient être contestés dans un délai de 2 ans, voire plus. Ces informations sont encore diffusées sur :
Des forums juridiques non modérés,
D’anciens articles de blog non mis à jour,
Des fiches juridiques encore visibles sur certains sites.
Aujourd’hui, le délai de 12 mois est la règle pour toute contestation liée à la rupture du contrat de travail, sauf exceptions spécifiques (cf. harcèlement, droits fondamentaux).
Conseil : vérifiez toujours la date de publication d’un contenu juridique. Un article daté d’avant 2017 peut induire en erreur.
Distinction avec d’autres modes de rupture
Autre confusion fréquente : confondre le licenciement avec d’autres formes de rupture du contrat, qui obéissent à des délais différents.
Rupture conventionnelle : 12 mois à compter de l’homologation (et non de la signature).
Transaction après licenciement : souvent irrévocable si acceptée sans vices.
Prise d’acte de rupture ou résiliation judiciaire : prescription applicable dès que la rupture est actée.
Exemple : contester une rupture conventionnelle après 12 mois d’homologation est irrecevable, même si vous avez changé d’avis entre-temps.
Ces distinctions sont subtiles mais essentielles pour éviter de perdre ses droits par confusion de procédure.
Conseils pratiques pour ne pas rater le délai
Le respect du délai de prescription est un enjeu décisif dans toute contestation de licenciement. Voici les bonnes pratiques à adopter dès la réception de la lettre pour éviter toute erreur de calcul ou omission fatale.
Conserver les preuves (accusé de réception, enveloppe, documents)
Dès la réception de la lettre de licenciement :
Conservez l’enveloppe (elle contient la preuve de la date de réception).
Prenez une photo ou un scan de l’accusé de réception.
Notez dans un agenda ou un document la date précise de remise.
Astuce : créez un dossier dédié, physique ou numérique, où vous centralisez tous les échanges liés à la rupture.
Fixer le calendrier : comment calculer sans erreur
Identifiez la date de réception effective.
Le lendemain est le point de départ du délai de 12 mois.
Inscrivez une alerte 2 mois avant l’échéance pour prendre les devants.
Exemple : lettre reçue le 28 août 2025 → prescription jusqu’au 28 août 2026 inclus.
⚠️ Le délai n’est pas prorogé en cas de week-end ou de jour férié. Il s’agit d’un délai en jours calendaires, non ouvrables.
Quand agir : saisine du conseil de prud’hommes et précautions utiles
Ne laissez pas passer le temps. Voici les étapes recommandées :
Consultez un avocat dès la réception de la lettre si vous envisagez de contester.
Préparez votre dossier : courrier de licenciement, contrat, bulletins de salaire, éventuelles preuves de harcèlement ou d’abus.
Saisissez le Conseil de prud’hommes via le formulaire Cerfa ou par avocat, en veillant à respecter le délai.
Vous pouvez aussi demander une conciliation : une étape obligatoire qui peut aboutir à un accord rapide.
Un dépôt même tardif (le dernier jour) est recevable, mais n’attendez jamais le dernier moment. Une erreur de date ou d’envoi peut ruiner votre dossier.
Conclusion
Contester un licenciement ne se résume pas à démontrer une injustice : encore faut-il le faire dans les délais impartis. La prescription légale est sans appel : 12 mois, ni plus ni moins, à compter du lendemain de la réception de la lettre. Au-delà, vos arguments — même fondés — ne seront plus entendus.
Chez Monciero Avocats, nous savons que chaque jour compte. C’est pourquoi nous accompagnons nos clients dès les premières heures qui suivent la rupture du contrat. Notre objectif : vous protéger contre les erreurs de forme, vous aider à bâtir un dossier solide, et maximiser vos chances d’obtenir réparation.
Vous avez reçu une lettre de licenciement et vous hésitez à agir ? Ne laissez pas le temps décider pour vous. Contactez-nous dès maintenant pour sécuriser vos droits et envisager sereinement la suite.
Auteur
Jean-Gabriel Monciero
Avocat à la Cour
Depuis plus de 10 ans, le cabinet Monciero Avocat dédie entièrement son expertise en droit du travail et en droit social au service des salariés et notamment des cadres.